Partage des locaux pour un professionnel de santé et droit de regard du bailleur sur la cession de patientèle 

Je suis psychomotricien. J’exerce dans des locaux partagés. Est-ce que mon bailleur a le droit d’interférer dans ma cession de patientèle lorsque je décide de quitter mon local professionnel ?  

Il est tentant lorsqu’on possède un local qu’on met à disposition des professionnels de santé de s’interférer, dans la mesure du possible, dans l’activité de celui-ci.  

Pour différentes raisons : pécuniaires (of course) notamment parce que la santé peut être une activité lucrative ou tout simplement parce qu’on souhaite garder le contrôle sur les activités exercées dans son local…. 

La question est : est-ce que c’est légal ?  

La réponse dépend un peu de ce qu’on souhaite faire.  

Dans le cas passé au crible ici, on analyse la situation d’un psychomotricien qui exerce dans des locaux partagés et souhaite quitter ces locaux en cédant sa patientèle à son repreneur.  

Pour exercer dans ses locaux, le psychomotricien a signé un bail professionnel contenant un certain nombre de clauses dont celles relatives à la résiliation du bail et les conditions de celle-ci. Rien n’est prévu concernant la cession de patientèle.   

Pour rappel, l’article L4001-1 du code de santé publique définit le professionnel de santé comme ayant une mission de santé publique telle que « les obligations déclaratives, la participation à des actions de prévention, de dépistage et de soins nécessitées par un contexte d’urgence sanitaire, mises en œuvre par les agences régionales de santé, la participation à des actions de veille, de surveillance et de sécurité sanitaire ».    

Le législateur a réparti les professionnels de santé en trois catégories parmi lesquelles figurent les professions d’auxiliaires médicaux dont font partir les psychomotriciens.  

Mais, à la différence des médecins, il n’existe pas de code de déontologie applicable aux psychomotriciens. Seul le code de santé publique leur est applicable (articles L4332-1 à L4332-7). 

Au moment du départ, le bailleur informe le psychomotricien qu’il lui interdit de céder sa patientèle au repreneur. Interdiction formelle et absolue.  

Les motivations qui justifient ce refus ne sont pas claires. Pour une analyse juridique simple, elles nous importent peu. Laissons-les donc de côté pour l’instant.  

Le bail qui lit le psychomotricien au bailleur est régi par la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l’investissement locatif, l’accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l’offre foncière (articles 57 A et 57 B). 

Aux termes de l’article 57 A de la loi précitée, il est prévu que le locataire peut, à tout moment, notifier au bailleur son intention de quitter les locaux en respectant un délai de préavis de six mois.    

En ce qui concerne la cession de patientèle, il n’existe aucune disposition particulière applicable en la manière. Par conséquent, le droit commun s’applique. Le psychomotricien est donc libre de céder sa clientèle. Cette cession peut être partielle ou totale.  

Si cette interdiction est mentionnée dans le bail, on peut envisager de demander la nullité de la clause devant le juge des contrats.  

Si cette interdiction n’est pas mentionnée dans le bail, libre au professionnel de santé de signer ce contrat de cession de patientèle avec le repreneur. On rappelle qu’en vertu de l’article 1165 du Code civil, les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes. En outre, avec la confidentialité qu’on peut apporter dans le contrat de cession de patientèle, le bailleur ne serait pas informé de cette cession.  
 

On espère avoir déblayé le sujet. Si vous êtes professionnel de santé (pas nécessairement psychomotricien), que vous êtes confronté à cette situation, et que vous avez des questions, contactez-nous

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